Evolution historique du milieu agricole français et enjeux à venir

23 novembre 2023

par
Lise

Un de nos agriculteurs partenaires dans son champ après la moisson
Un de nos agriculteurs partenaires dans son champ après la moisson

Introduction

Le dernier rapport de la chambre d’agriculture datant de 2022 souligne que la France est la première puissance agricole européenne. En effet, elle produit les plus gros volumes en blé tendre, maïs, oléagineux et betterave sucrière. La France partage sa médaille d’argent pour la production de volailles de chair avec l’Espagne, derrière la Pologne, et partage celle de bronze pour la production de légumes avec le Pays-Bas, derrière l’Espagne puis l’Italie.

Ainsi, l’agriculture française s’inscrit comme forte puissance dans un contexte européen. Nous nous intéresserons dans cet article à ce qui caractérise l’agriculture de l’Hexagone et aux profils des acteurs des champs français.

 

I. Les chiffres clés surfaciques de l’agriculture française

1. Les activités agricoles façonnent la majorité du territoire français

En France métropolitaine, la superficie du territoire s’élève à 55 millions d’hectare (ha) dont la moitié est façonnée par l’agriculture. En effet, 49% du territoire constitue la surface agricole utilisée (SAU), soit 26.7 millions d’hectares.

Selon L'INSEE, les 51% des surfaces françaises non agricoles correspondent :

  • aux sols naturels pour 42% (en majorité les forêts - 17 millions d’hectares en France métropolitaine - mais aussi les sols sous les eaux ou savanes et friches etc.)
  • aux espaces artificialisés pour 9% (comme les bâtiments, routes, voies ferrées, etc.).

La SAU correspond à la surface dédiée aux productions agricoles comme :

  1. les terres arables pour 62% de la SAU (regroupant notamment les grandes cultures, cultures maraîchères, prairies artificielles, jachères) ;
  2. les surfaces toujours en herbe pour 34% (comme les prairies permanentes et les alpages) ;
  3. et les cultures pérennes pour 4% (c’est-à-dire les vignes et vergers).

Répartition de la superficie de la France métropolitaine selon la typologie de sols
Répartition de la superficie de la France métropolitaine selon la typologie de sols

Au sein des terres arables, 14,1 millions d’hectare (Mha) sont occupés par les grandes cultures (céréales, oléagineux, protéagineux, betterave, pomme de terre, etc.). Elles sont principalement marquées par le blé avec 4.8 Mha, par l’orge à hauteur de 1.9 Mha,  par le colza au niveau de 1.4 Mha, par le maïs ensilage avec 1.4 Mha et par le maïs grain à hauteur de 1.3 Mha.

Répartition en millions d'hectare des principales grandes cultures en France
Répartition en millions d'hectare des principales grandes cultures en France (source : Agreste)

Selon l’Insee, les régions qui contribuent le plus à la production agricole économiquement en 2018 sont la Nouvelle-Aquitaine, le Grand Est, la Bretagne et les Pays de la Loire. Dans la plupart des régions, les productions végétales génèrent plus de la moitié de la valeur. Les productions animales prédominent seulement dans les Pays de la Loire, en Bretagne et en Auvergne-Rhône-Alpes.

2. Les activités agricoles impactent la terre et l’atmosphère

L’activité agricole impacte non seulement le paysage français mais également le climat. Deuxième émetteur national après le transport et juste devant l’industrie, l’agriculture et la sylviculture représentent 19% des émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) en 2022. D’après le centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), les principaux gaz alors responsables sont le méthane (CH4) notamment émis par l’élevage (fermentation entérique des ruminantes), le protoxyde d’azote (N2O) émis par les grandes cultures (liés à la fertilisation azotée) et le dioxyde de carbone (CO2) notamment lié à la consommation de carburant des engins agricoles.

 

II. Les récentes évolutions qui modèlent l’agriculture française actuelle

1. Le nombre d’exploitation a chuté de 100 000 en une décennie et la taille moyenne des fermes s’élève désormais à 69ha.

Depuis 1982, la surface agricole utile de l’Hexagone a diminué de 10% au profit des sols artificialisés. La surface de ces derniers est comparable actuellement à la surface française cultivée en blé de 5 Mha. Le nombre d’exploitation diminue avec la SAU. D’après le recensement agricole de 2020 réalisé par Agreste, le nombre de ferme diminue de 2.3% par an, soit de 100 000 unités en 10 ans. Elles sont comptabilisées à ~389 000 fermes en France métropolitaine. La surface moyenne des exploitations agricoles atteint 69 ha en métropolitaine, soit 14 ha de plus qu’en 2010 et 27 ha de plus qu’en 2000. En 50 ans la superficie moyenne des exploitations gagne 50 hectares.

En 50 ans, 1 200 000 exploitations disparaissent et pour les 400 000 exploitations restantes leur surface augmente de 50 ha.
En 50 ans, le nombre d'exploitations agricoles en France a baissé de 1 200 000

Les grandes exploitations (dont la production brute standard (PBS) est supérieure à 250 000 euros) représentent 40% du territoire et 1/5 des exploitations. Leur SAU moyenne est de 136 ha. Ce type de grandes exploitations a augmenté de 7% en 10 ans.

Au contraire, les micro-exploitations (dont le PBS est inférieur à 25 000 euros) diminuent de 31% en 10 ans avec une moyenne de 12 ha. Ce type de ferme représente 3/10 des exploitations, soit 5% de SAU.

 

2. La spécialité élevage baisse d’un tiers en une décennie au profit du maraichage et des exploitations spécialisées en grandes cultures

Le recensement agricole témoigne d’une diminution marquée des éleveurs français entre 2010 et 2020. Ce sont 30% des élevages, soit 63 500 fermes qui disparaissent en une décennie. Ce constat est d’autant plus marqué parmi les exploitations combinant plusieurs types d’élevages, comme les bovins conjuguant production de lait et de viande (-40%) ou parmi les fermes associant cultures et élevages (-40% également). Le cheptel français est amputé de 7% pour conserver en 2020 24 499 milliers d’unités gros bétail (UGB).

La tendance est inversée pour les exploitations maraîchères (+7% en 10 ans). En 2020, 52% des exploitations sont spécialisées en production végétale contre 45% en 2010. Ainsi, les agriculteurs et agricultrices tendent vers la spécialisation de leur système au profit de la polyvalence. C’est le cas pour 90% d’entre eux.

 

3. Une population agricole vieillissante et remplacée en moyenne dans un tiers des cas

La proportion des exploitants ayant un âge inférieur à 40 ans reste stable entre 2010 et 2020. Elle représente 20% des installés, soit 100 500 de jeunes agriculteurs. Néanmoins les chefs d’exploitations et co-exploitants de plus de 60 ans augmentent de 5% cette dernière décennie pour atteindre 25% en 2020. Les prochaines années seront donc marquées par le départ à la retraite de ces 25%. Un fort enjeu reste donc le renouvellement de la génération de futur retraités agricoles. Comme évoqué plus haut, entre 2010 à 2020, le nombre de fermes a baissé de 100 000 selon l’Agreste. Aujourd'hui, selon la mutualité sociale agricole (MSA), pour trois agriculteurs qui partent seulement un jeune s'installe. En 2020, les installations des moins de 40 ans ont baissé de 7% par rapport à 2019 et le taux de renouvellement des chefs d’exploitation de 3%. En 2020, 9 000 jeunes agriculteurs se sont installés et un peu plus de 3 000 ont sauté le pas tout en étant plus âgés.

La proportion de salariés permanents non familiaux assure une part plus importante du travail agricole. Elle a augmenté de 4% cette décennie.

Les femmes représentent toujours un petit quart des dirigeants d’exploitation agricole. Une légère baisse peut même être soulignée depuis 10 ans, passant de 27 à 26%. Néanmoins elles constituent 32% des jeunes installés en 2020.

III. De nombreux freins à la reprise agricole

Bien que le métier d’agriculteur et d'agricultrices touche à tout et soit un moyen d’entretenir son environnement, il n’en reste pas moins très sujet à l’opinion publique et aux aléas en tout genre.

1. Une lourde charge de travail

Le métier d’agriculteur est un métier à plein temps qui nécessite passion et force de travail. Les compétences pour réaliser ce métier sont multiples : qualification en gestion d’entreprise, connaissances techniques, organisation administrative, vision économique, etc. De plus, le nombre d’heures passées sur le tracteur, à l’étable, à la commercialisation, à réfléchir son système dépassent les 35 heures par semaine. Par exemple, l’un des systèmes où l’astreinte est l’une des plus développées est l’élevage, puisque nourrir ses animaux nécessite une présence matin et soir (week-ends et vacances inclus). Ce niveau intensif de travail participe au déclin du nombre d’éleveur de 63 500 ces dernières dix années.

2. Un isolement rural qui en décourage certains

L’installation seul, conjuguée à une forte intensité de travail, peut impacter la sociabilisation de certains agriculteurs. Ainsi, pour prémunir le risque de fatigue physique et mentale ainsi que l’isolement rural, l’installation en collectif peut être une alternative. En 2020, 54% des installations se sont faites en société. C’est la forme juridique du groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) qui reste majoritaire (24.8%) comparé aux EARL (17.4%).

 

3. L’impact de l’opinion publique et actions de « agri-bashing »

Un autre facteur qui limiterait l’installation agricole est le regard que peut porter le consommateur sur la profession. Leur mode de consommation façonne l’amont de la chaine agro-alimentaire. Par exemple, la diminution de la consommation de viande, jugée trop polluante, a directement participé à la baisse de 30% du nombre d’éleveurs ces dix dernières années. En 2018, se popularise même la terme d’ ”agri-bashing” pour caractériser les critiques virulentes faites au mode de production agricole intensif. Il a eu pour objectif de souligner un mode de production moins vertueux dans le but de le faire changer. Néanmoins une autre conséquence a été de ternir par la même occasion l’image positive de l’agriculture française. En réaction, une augmentation des signes de qualité peut être soulignée. La certification agriculture biologique augmente de 8,4% entre 2010 et 2020 pour atteindre 12,1% des exploitations en 2020. De plus, 27% des fermes sont sous un autre signe officiel de qualité ou d’origine, soit une augmentation de 3% depuis 2010. Enfin, 23% des exploitations vendent en circuit court, en vente directe ou via un seul intermédiaire en gagnant 6 points en une décennie. Ces récentes évolutions (signes de qualité et circuits courts) améliorent les pratiques et la vision de l’agriculture française. Les acteurs ruraux se rapprochent ainsi des consommateurs et en profitent pour témoigner de leur quotidien et sensibiliser aux enjeux agricoles.

 

4. Une accélération vive et récente des tensions sur la filière : conséquences directes des conflits armés

Le contexte géopolitique continue de se tendre ces dernières années avec le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. Cette annonce a brusquement interrompu la totalité des exportations de céréales et oléagineux depuis l’Ukraine et une grande partie de celles de la Russie. Cela a provoqué une envolée des cours du blé, du maïs et des oléagineux. La Russie et l’Ukraine représentent 28% des exportations de blé, 14% de celles de maïs et 70% de celles de l’huile de tournesol.

Les conflits armés ont entrainé une forte inflation qui touche fortement le secteur agricole. En effet, les prix des engrais, du carburant et de l’énergie augmentent. L’INSEE montre une hausse de 86% du prix des engrais et amendements entre juillet 2021 et le même mois en 2022.

 

5. Le dérèglement climatique impacte fortement les rendements agricoles

Le dérèglement climatique s’intensifie et se fait toujours plus ressentir dans le secteur primaire. Les gelées se rarifient ce qui limite la destruction naturelle de certaines adventices. La hausse des températures restreint également les phénomènes de stratification à froid ou de vernalisation. Le premier entraine la germination des graines par levée de leur état de dormance, le second permet la floraison notamment des bisannuelles. D’autres conséquences du changement climatique qui impactent le milieu agricoles ont les pluies intensives hivernales et sécheresses estivales que vont connaître les agriculteurs de manière plus récurrentes. Pour exemple, pendant six jours en novembre 2023, certaines zones du Boulonnais reçoivent 400 mm d’eau, ce qui est plus que les moyennes du mois d’octobre (89 mm) et novembre (90mm) dans le Pas-de-Calais. Un autre exemple est le mois de juillet 2022 qui représente le deuxième mois le plus sec jamais enregistré en France, après mars 1961. Ces épisodes extrêmes de plus en plus fréquents (inondations ou sécheresses) impactent négativement les rendements agricoles et ainsi les revenus des exploitants.

 

6. L’augmentation du prix du foncier

Le coût d’acquisition de la terre reste une des plus grosses barrières à l’entrée à l’installation agricole. Selon la fédération nationale des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER), le prix moyen d’achat de terres et prés s’élève à 6 130€/ha en 2022, soit une augmentation de 3.2% depuis 2021. Pour pallier l’endettement des jeunes installés, le mouvement citoyen français Terre de Liens se crée en 2003. En effet, cette association rachète du foncier agricole pour les louer ensuite à des agriculteurs qui désirent développer une agriculture biologique, paysanne et de proximité. Ainsi leur investissement à l’installation est moindre. Depuis 20 ans, Terre de Liens a acquis 300 fermes en France et a contribué à installer plus de 700 paysans et paysannes. Une autre aide pourrait être Ferme en vie (FEVE)  qui aide les agriculteurs à créer des fermes agro-écologiques via l’épargne solidaire. Ce sont déjà 16 projets en cours de réalisation. Pour en citer un dernier, Hectarea permet aux particuliers d’investir dans les sols agricoles ce qui donne l'occasion aux agriculteurs d’accéder plus facilement au foncier agricole pour lancer leur projet.

IV. ReSoil, un soutien pour les agriculteurs et agricultrices, existants et repreneurs, engagés pour l'agriculture régénératrice

ReSoil propose un accompagnement économique, administratif et agronomique aux agriculteurs souhaitant s'engager dans une transition vers l'agriculture régénératrice.

 1. Un soutien économique pour la culture de carbone

ReSoil accompagne des agriculteurs partout en France engagés dans la transition bas-carbone de leur exploitation agricole. Tous nos projets sont certifiés par le Label bas-carbone. Ce label créé par le Ministère de la transition écologique permet à des entreprises financeuses de soutenir des projets de stockage de carbone dans les sols et de réductions d’émissions de gaz à effet de serre. Les agriculteurs engagés pour une durée de cinq ans dans cette démarche, mettent en place des leviers de l’agriculture régénératrice. Ces acteurs touchent alors un revenu additionnel entre 40€ et 80€/ha chaque année le temps de leur projet de transition (5 ans). En outre, chez ReSoil nous ne facturons aucun frais liés à cette démarche aux agriculteurs.

2. Un accompagnement administratif vers la labellisation bas-carbone

Au cours du projet label bas-carbone, toutes les démarches administratives sont réalisées par ReSoil. Cela concerne la réalisation du diagnostic carbone, la labellisation avec la DREAL et les échanges avec les auditeurs. Ainsi, les charges administratives sont fortement limitées pour l’agriculteur qui peuvent se concentrer sur l'essentiel, la transition de leur exploitation.

 

3.  Une aide pour les acteurs d'une agriculture respectueuse de l’environnement

L’accompagnement des agriculteurs et agricultrices de l’Hexagone par ReSoil s’inscrit dans une démarche de soutien au développement de l'agriculture régénératrice. En phase avec une nouvelle vision plus écologique et systémique de l’agriculture, cette agriculture a pour objectif de restaurer la santé des sols en augmentant leur teneur en matière organique , en améliorant leur structure et leur potentiel de stockage de carbone. Les conseils agronomiques de ReSoil n’ont pas vocation à remplacer ceux des technico-commerciaux ou conseillers agricoles mais bien de renforcer les connaissances sur certains leviers agricoles "bas-carbone". Ces derniers sont divers et peuvent notamment correspondre à l’implantation de couverts végétaux efficaces pour stocker du carbone dans les sols mais aussi à limitation de l'utilisation d’intrants afin (i) de limiter les émissions de gaz à effet de serre de la ferme liée à la fertilisation des cultures et (ii) de préserver la biodiversité (réduction de l'utilisation des pesticides).

Agriculteurs, agricultrices, pour en savoir plus sur notre action et découvrir nos projets agricoles déjà labellisés : consultez notre offre, découvrez les projets de nos agriculteurs partenaires ou contactez-nous.

100 000 fermes à reprendre d'ici 2030 - Infographie ReSoil
100 000 fermes à reprendre d'ici 2030 - Infographie ReSoil