Qu’est ce que la contribution carbone et quelle différence avec la compensation carbone ?

30 juillet 2023

par
Grégoire

Définition de la contribution carbone

Selon l’agence de la transition écologique (l'ADEME - Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), la "contribution carbone" consiste, pour un financeur (entreprises, collectivités, particuliers, etc.) à soutenir un projet de réduction ou de séquestration d’émissions de gaz à effet de serre dont il n’est pas directement responsable (c'est à dire en dehors de sa chaîne de valeur). Les impacts de ces projets sont mesurés et aboutissent à la création de crédits carbone, représentant chacun une tonne équivalent CO2 réduite ou séquestrée. Pour le financeur, ces crédits peuvent servir dans le cadre de sa stratégie climatique”. Il s’agit d’une démarche volontaire, et non d’une obligation légale.

Pourquoi faire de la contribution carbone ? Une prise de hauteur s’impose

En décembre 2015 est né l’Accord de Paris lors de la COP 21 pour limiter le réchauffement climatique planétaire entre 1,5°C et 2°C par rapport à l’ère préindustrielle. L’accord est entré en vigueur le 4 novembre 2016 et à ce jour, 194 pays l’ont ratifié. Cet accord engage chaque pays à publier sa “Nationally Determined Contribution” ou “Contribution Nationale Déterminée” en français (NDC), qui explique comment il compte limiter la hausse des températures. Arrêter le réchauffement climatique signifie atteindre la neutralité carbone, c’est à dire atteindre le point d’équilibre entre les émissions annuelles de gaz à effet de serre (GES) et les absorptions de GES permises par les puits naturels de carbone, qui retirent et stockent le CO2 de l’atmosphère. Ces puits de carbone  sont les forêts, les terres agricoles, et les océans.

Ce qui importe est donc la vitesse à laquelle on atteint ce point de bascule que représente la neutralité carbone planétaire. Plus on attend, plus l’équilibre se fera à un niveau de température élevé. L’objectif de neutralité fixé à 2050 doit permettre de limiter le réchauffement global en dessous de 2°C (à noter qu’il s’agit d’une augmentation moyenne planétaire, avec des variations géographiques).

La Stratégie Nationale Bas Carbone en France

La NDC de la France s’appelle la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC), créée en 2015 et mise à jour en 2020. Pour atteindre la neutralité carbone sur le territoire en 2050, elle indique que nous devons diviser nos émissions territoriales par 6 et multiplier par 2 nos puits de carbone nationaux. Elle appelle donc chaque citoyen, entreprise et collectivité à participer à cet effort collectif.

Soutenu par l’ADEME, le cabinet Carbone 4 a publié une Matrice pour aider à y voir clair dans le plan d’action, appelée Net Zero Initiative (NZI). Elle est composée de 3 piliers :

La Matrice Net Zero Initiative (NZI) de Carbone 4
Matrice Net Zero Initiative (NZI)

Le pilier A consiste à réduire ses propres émissions. Le pilier B consiste à réduire les émissions des autres, soit en proposant un produit ou service moins carboné utilisé par d’autres (exemple: vendre des vélos qui permettraient de se substituer à l’usage de la voiture), soit en finançant des projets de réduction d’émissions hors de sa chaine de valeur (contribution carbone). Enfin, le pilier C consiste à augmenter les puits de carbone, soit en tant que gestionnaire de puits de carbone pour les entreprises du secteur des terres, soit par le financement de projets de séquestration carbone pour toutes les autres entreprises (contribution carbone).

Pour une entreprise ou une collectivité, la contribution carbone permet donc de développer une stratégie sur les piliers B et C pour répondre aux exigences de la SNBC. Une telle stratégie n’est valable qu’à condition que l’entreprise ait déjà mis en place une stratégie de réduction de ses propres émissions (pilier A). Réduire ses émissions et contribuer à hauteur de ses émissions résiduelles définissent une stratégie climat crédible.

Comment choisir ses projets de contribution carbone ?

Il y a 5 grands critères obligatoires pour qu’un projet puisse être éligible à un financement via contribution carbone, aussi appelé "finance carbone". Les preuves de respect de ces critères garantissent la qualité d’un crédit carbone :

  1. Additionnalité : le projet n’est pas rentable économiquement, et ne serait pas mis en place sans le financement issu de la vente des crédits carbone. Le projet ne doit pas non plus résulter d’une obligation réglementaire ;
  2. Mesurabilité : des méthodologies reconnues au niveau international, comme celles du Label bas carbone reposant sur les dernières études scientifiques pour mesurer et suivre les émissions réduites ou séquestrées ;
  3. Permanence : cet impact doit être permanent, le carbone séquestré ne doit pas être déstocké ;
  4. Unicité : un même crédit carbone ne peut pas être vendu à deux acheteurs différents. Les crédits doivent donc être traçables, inscrits dans un registre ;
  5. Transparence et vérifiabilité : des audits par des tiers externes doivent avoir lieu sur le terrain, et dans un processus de registre public


Le Label bas-carbone, label le plus robuste pour contribuer efficacement et avec impact

Logo du Label bas-carbone (LBC)
Logo du Label bas-carbone (LBC)


Il existe de nombreux standards permettant de générer des crédits carbone, régis par différentes normes. Toutefois, cette multiplicité d’acteurs aux fonctionnements et méthodes de calcul quelque fois opaques a œuvré à décrédibiliser le marché de la contribution carbone volontaire, par manque de transparence sur les critères clés cités ci-dessus. Pourtant, lorsqu’il est bien mis en place, le mécanisme de contribution carbone est vertueux !

Pour remédier à ce problème, le Ministère de la transition écologique a créé en 2018 un nouveau label, le Label bas-carbone. Ce label est recommandé par l’ADEME pour tous les projets de réduction ou de séquestration d’émissions sur le territoire français. Il permet de générer des projets locaux, pour plus de transparence, et rassure les porteurs de projet comme les entreprises, garantissant l’absence de greenwashing :

  1. Indépendance et fiabilité du labellisateur : label public géré par les directions régionales de l’environnement, le labellisateur ne touche pas de rémunération sur les crédits qu’il génère, contrairement à tous les autres standards privés. Cette indépendance est clé pour ne pas être à la fois juge et partie
  2. Rigueur scientifique des méthodes de calcul et de la permanence du carbone séquestré ou évité : la méthode Grandes Cultures du Label bas-carbone sur laquelle repose notamment l'offre de ReSoil, a été travaillée par les plus grands experts du secteur, et validée par l’ADEME et l’INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement). Cette méthode est disponible en open source sur le site du Label bas carbone, pour une transparence totale
  3. Vérifiabilité : les crédits ne sont générés qu’après revue sur site par un auditeur externe agréé par le Label bas-carbone
  4. Unicité des crédits généré : le Label bas-carbone tient un registre de la vente des crédits pour empêcher tout doublon, mais va même encore plus loin. Une seule transaction est autorisée entre le financeur et le porteur de projet. Cette règle évite toute spéculation sur l’évolution du prix des crédits, pratique aperçue dans d’autres standards. Cela assure aussi que chaque flux finance bien un projet.

Couvert végétal mélligère au premier plan, avec un champ de pomme de terre à l'arrière plan
Au premier plan, un couvert végétal mellifère

Mais au fait, on dit contribution carbone ou compensation carbone ?

Historiquement, le mot compensation était le plus employé. Il a toutefois été noté qu’il donnait l’impression que financer des projets permettait de compenser, et donc “d’annuler” les émissions d’une entreprise. Ce serait comme un droit à polluer, alors que ce n’est évidement pas le cas ! Toutes les entreprises qui laissent entendre cela dans leur communication font ce qu’on appelle du “greenwashing” et s’exposent désormais à des sanctions. L’ADEME s’oppose ainsi à la terminologie “entreprise neutre carbone”. La réflexion sur la neutralité doit se faire à l’échelle planétaire, ou à l’échelle d’un territoire, mais pas d’un acteur. Si tout le monde faisait de la “compensation carbone”, sans réduire ses émissions dans le même temps, il faudrait l’équivalent de 4,5 planètes terre  pour que les puits de carbone absorbent toutes nos émissions ! Le greenwashing, c’est financer des puits de carbone hors de sa chaine de valeur sans réduire ses propres émissions.

L’ADEME recommande donc d’utiliser le terme de contribution carbone, car comme le montre la matrice NZI, contribuer et réduire ses émissions sont 2 piliers distincts d’une bonne stratégie climat, sur lesquels il faut définir deux stratégies distinctes, et surtout ne pas additionner. A ce titre, l’ADEME précise bien que cette contribution ne peut pas rentrer dans la mesure de l’empreinte carbone d’une entreprise (la publication de la mesure de l’empreinte carbone est une obligation légale pour toutes les entreprises de plus de 500 salariés en France). La contribution est valorisée hors bilan, dans une comptabilité distincte.

Une seule chose à retenir pour une stratégie climat robuste : contribution doit rimer avec réduction de ses propres émissions, alors qu’offsetting (le mot anglais pour compensation) rime avec greenwashing !

Allez, un dernier détail, c’est presque fini : quelle différence avec les “quotas carbone” du marché européen du carbone (EU ETS) ?

On aurait pu écrire “quel point commun avec le marché EU ETS ?”, ce serait plus simple à expliquer, car il n’y en n’a pas ! Le European Union Emission Trading System - EU ETS, ou encore SEQE en français pour “système d’échange de quotas d’émission”, né en 2005, oblige certains secteurs d’activité qui génèrent beaucoup d’émissions de CO2 à ne pas dépasser un certain seuil. Ce sont en quelque sorte des "droits à polluer" pour ces secteurs. Les secteurs concernés sont la production d’électricité, les réseaux de chaleur, l’acier, le ciment, le raffinage, ou encore le verre et le papier. Chaque acteur dispose donc d’un stock de quotas carbone qui lui est attribué. Il est possible d’acheter les quotas d’un autre acteur si celui ci n’a pas atteint son plafond d’émissions. Contrairement au mécanisme de la contribution carbone, l’achat de quotas carbone sur le marché EU ETS auprès d’un autre acteur ne finance en aucun cas un projet de réduction ou de séquestration de CO2. Il s’agit simplement d’un échange de quotas. Ce marché a été fortement critiqué pour son inefficacité, à cause du nombre trop élevé de quotas carbone mis à disposition de ses acteurs. Certains acteurs très émetteurs de CO2 gagnaient même de l’argent en vendant leurs quotas non utilisés sans réduire leurs émissions ! Ce mécanisme n’incite pas à réduire les émissions. Il est en cours de révision par l’Union Européenne pour réduire drastiquement le nombre de quotas disponibles, et pour élargir l’obligation à d’autres secteurs d’activité comme l’aviation civile ou le transport maritime.

Comme toutes les entreprises, celles qui sont concernées par le EU ETS sont appelées à réduire leurs émissions (donc à utiliser de moins en moins de quotas) et à contribuer à la neutralité carbone en finançant des projets de séquestration carbone.

Autres liens utiles :

Découvrir l'offre de ReSoil pour les entreprises
Voir les projets de nos agriculteurs partenaires
Envie d'en savoir plus ? : Contactez-nous